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Je sais très bien, pour l’avoir vécu, que l’éjaculation précoce est un mal que l’on cache. Rares sont ceux qui osent parler du problème, même avec leur médecin. C’est donc un sujet sur lequel gravitent, aujourd’hui encore, de nombreuses idées reçues. Dans cet article, levons les tabous pour démêler le vrai du faux.
Les éjaculateurs précoces sont des égoïstes
↳ FAUX !
On a tendance à croire que l’éjaculateur précoce est quelqu’un d’égoïste, qui ne pense qu’à son propre plaisir et pas à celui de sa partenaire. Pourtant, c’est faux, c’est même tout l’inverse !
En effet, l’éjaculation précoce est quelque chose qu’on subit. Je peux en témoigner, je ne trouvais pas ça agréable DU TOUT d’avoir un orgasme aussi rapidement. J’étais bien loin de « prendre mon pied ».
De plus, l’éjaculateur précoce est généralement quelqu’un qui pense uniquement à donner du plaisir, à satisfaire à tout prix sa partenaire. C’est, paradoxalement, quelqu’un d’attentionné, pas du tout centré sur son plaisir à lui. Bref, aux antipodes de l’egoïsme.
L’éjaculation précoce est due à une hypersensibilité du gland
↳ FAUX !
L’éjaculation précoce n’est pas due à un problème corporel. Du moins, dans 98% des cas. Car certes, il existe bien des causes physiques :
- frein trop court
- prépuce trop étroit (phimosis)
- inflammation de la prostate
Mais celles-ci sont extrêmement RARES.
Donc, rassurez-vous, votre gland n’est pas plus sensible que celui des autres hommes. Vous n’avez pas non plus un appareil génital défaillant, un problème hormonal, une déficience musculaire ou encore un trouble neurologique.
Une étude scientifique réalisée en 1984 a même démontré que le système génital des hommes souffrant d’éjaculation précoce fonctionnait exactement de la même façon, en réponse à une stimulation sexuelle, que celui des autres hommes.
Inutile donc :
- de prendre un médicament contre l’éjaculation précoce en permanence
- d’envisager une circoncision
- de frapper votre gland ou de le laisser volontairement décalotté en permanence pour l’habituer aux frottements et le désensibiliser
Non, tout cela ne résoudra absolument pas votre problème.
En réalité, l’éjaculation précoce résulte d’une mauvaise gestion de la montée de l’excitation sexuelle. Un éjaculateur précoce emploie malgré lui des stratégies contre-productives pour faire durer le rapport sexuel.
C’est en corrigeant ses mauvaises habitudes, en réalisant des exercices de rééducation, qu’il pourra réellement en venir à bout.
L’éjaculation précoce est une maladie
↳ FAUX !
Beaucoup de personnes considèrent l’éjaculation précoce comme une maladie. Certes, elle est qualifiée de trouble sexuel, car elle peut, sur le long terme, devenir un obstacle à l’épanouissement sexuel et à la vie de couple. Cependant, il faut bien comprendre que l’éjaculation précoce ne relève en rien d’une maladie. Elle est même le signe que le corps réagit « trop bien » aux stimuli sexuels.
Le réflexe éjaculatoire est une aptitude héritée de nos lointains ancêtres des cavernes, qui, face aux dangers omniprésents dans la nature, devaient être en mesure d’éjaculer vite pour assurer la survie de l’espèce. En effet, si on observe un rapport sexuel sous l’angle de la procréation, être capable d’éjaculer rapidement est un atout.
Toutefois, au fil du temps, les sociétés ont évolué. Aujourd’hui, nous envisageons la sexualité comme une quête de plaisir, aussi bien pour l’homme que pour la femme. Être capable de retarder l’éjaculation apparait donc comme une qualité, voire pour certains une nécessité.
Éjaculation précoce et infertilité vont de pair
↳ FAUX !
Les deux problèmes ne sont pas liés. L’infertilité masculine a principalement pour cause une mauvaise qualité et/ou quantité de sperme. Elle n’a donc rien à voir avec la durée du rapport sexuel.
Bien entendu, si l’éjaculation intervient avant même la pénétration, cela peut poser des problèmes pour la procréation. Mais il s’agit là d’un grade sévère d’éjaculation précoce et, heureusement, cela se soigne !
L’éjaculation précoce, ça passe tout seul
↳ FAUX !
Les hommes souffrant d’éjaculation précoce osent rarement en parler. J’en étais un bon exemple. On pense que le problème passera tout seul, ou que l’application d’un ou deux conseils isolés va permettre de rectifier le tir. Mais les spécialistes vous le diront, ça ne fonctionne pas. En effet, l’éjaculation prématurée, quand elle est systématique, n’est pas quelque chose que l’on peut guérir en claquant des doigts.
Combattre l’éjaculation précoce nécessite de mettre en place différents apprentissages pour reprogrammer le corps, comme l’expliquent les sexologues Pascal de Sutter et Alexandra Hubin. Plusieurs techniques ont fait leur preuve : respirer calmement, se relâcher pendant l’acte sexuel, adopter les bonnes postures, ne pas être uniquement focalisé sur son excitation, etc.
Chaque cas reste unique, bien entendu, mais c’est souvent au travers de ces exercices et d’une meilleure connaissance de soi que l’on parvient à allonger progressivement la durée de ses rapports sexuels.
L’éjaculation précoce est innée
↳ FAUX !
Contrairement aux idées reçues, nous ne sommes pas conditionnés à devenir éjaculateur précoce. Autrement dit, il n’existe pas de gène responsable de ce trouble.
Je citerai toutefois ici une étude menée par une équipe néerlandaise en 2008, qui a conclu à une possible responsabilité du gêne 5-HTTLPR, lequel contrôle le niveau de sérotonine. C’est la seule étude scientifique que j’ai trouvée qui va dans ce sens. Et elle est controversée.
Quand l’éjaculation précoce est dite « primaire », c’est-à-dire quand elle existe de façon récurrente (souvent depuis l’adolescence), avec toutes les partenaires sexuelles, elle est à mettre en relation avec une difficulté à maintenir un haut niveau d’excitation, à contrôler la pression musculaire exercée sur le pénis. Concrètement, c’est un défaut d’apprentissage.
Ce défaut d’apprentissage peut être accentué par des facteurs psychologiques tels que le stress, le manque de confiance en soi, la peur de l’échec.
À cela vient s’ajouter une mauvaise pratique de la masturbation. Souvent, chez les adolescents et les hommes jeunes, on a tendance à se masturber pour se soulager d’une pression sexuelle trop forte, plutôt que pour faire durer le plaisir. Il s’agit là d’une pratique fréquente, qui crée de mauvaises habitudes et laisse une sorte d’ « empreinte » au niveau des circuits neuronaux. Le cerveau intègre cet automatisme, le rejoue au moment des rapports sexuels et c’est ainsi que l’éjaculation se déclenche trop vite…
Mais, même si l’éjaculation précoce devient chronique, elle est loin d’être une fatalité et une prise en charge thérapeutique, basée sur l’apprentissage de certaines habiletés corporelles, peut tout-à-fait corriger le problème !
En ce qui concerne l’éjaculation précoce dite « secondaire », apparue plus tardivement et brutalement, elle peut être causée par une infection de la prostate ou de l’urètre, laquelle provoque une irritation locale à l’origine de l’éjaculation rapide. Elle peut aussi, plus vraisemblablement, être déclenchée par un choc émotionnel, des problèmes relationnels ou conjugaux, un changement de partenaire, ou encore une dépression.
Se masturber avant un rapport aide à ne pas éjaculer trop vite
↳ VRAI… ET FAUX !
On le lit un peu partout : se masturber avant l’acte sexuel permet d’être moins excité et donc d’éviter l’éjaculation précoce. Les anglophones appellent d’ailleurs cela le « safety wank », autrement dit la masturbation préventive.
C’est en partie vrai et en partie faux. Je m’explique.
Pour que cela fonctionne, il faut :
- vous masturber suffisamment en amont du prochain rapport sexuel, pour vous libérer de l’accumulation des tensions sexuelles
- vous masturber suffisamment en aval de votre dernière éjaculation, pour éviter une tension sexuelle trop basse
En gros, vous devez respecter une fenêtre de tir, une zone de tension sexuelle qui vous est propre. C’est ce que le sexothérapeute Éric Air appelle « le délai maximum de confort ».
En dehors du contexte que je viens de décrire, la pratique de la masturbation risque en revanche d’être contre-productive. Si elle est pratiquée de manière trop rapprochée du rapport sexuel, elle risque d’engendrer des difficultés à avoir une nouvelle érection.
Cela va donc générer du stress, une peur de l’échec, une montée de l’adrénaline… et accentuer, in fine, les risques d’éjaculation précoce.
C’est un phénomène qu’on observe notamment chez les personnes âgées pour qui la période réfractaire (période qui suit l’éjaculation et au cours de laquelle le pénis ne répond plus aux stimuli sexuels) est généralement plus longue.
De plus, il existe tout un tas de situations dans lesquelles cette technique ne fonctionne pas, comme par exemple :
- lorsque vous avez un rapport sexuel improvisé
- lorsque vous n’avez pas le temps de vous masturber avant l’acte sexuel
Paradoxalement, dans ces situations, vous serez plus angoissé car vous ne vous ne sentirez pas suffisamment préparé.
Enfin, ce type de masturbation, réalisé uniquement pour « se décharger », sans rechercher à faire durer le plaisir, ne va pas du tout vous aider à progresser dans la maitrise de votre degré d’excitation sexuelle.
Bref, cela peut vous paraître rassurant, mais en réalité c’est une fausse bonne idée !
L’utilisation d’un cockring (anneau pénien) aide à durer plus longtemps
↳ FAUX !
Je lis beaucoup d’articles vantant les mérites de l’anneau pénien pour retarder l’éjaculation. Pourtant, cet accessoire à placer à la base de la verge n’est pas conçu pour cela. Il aide uniquement à renforcer l’érection mais n’agit pas sur la maitrise de votre éjaculation !
De manière plus générale, l’utilisation d’accessoires pour le traitement de l’éjaculation prématurée n’est, selon moi, pas une bonne idée.
Le premier rapport sexuel détermine tous les autres
↳ FAUX !
Si vous estimez que votre premier rapport sexuel est un raté, n’en tirez pas de conclusions trop hâtives. Celui-ci ne détermine nullement la suite de votre vie sexuelle.
À l’adolescence, on découvre la sexualité, souvent avec beaucoup de fougue. On a peu d’expérience, il est donc normal que l’éjaculation arrive très vite. Avec le temps, on apprend petit à petit à maintenir son degré d’excitation de façon plus stable, à identifier les signes qui précèdent l’éjaculation (le corps qui se raidit, la respiration qui s’accélère…), et, ainsi, à mieux contrôler le moment où arrive l’orgasme.
Et oui, le sexe est avant tout… un apprentissage ! Faire régulièrement l’amour aide à durer plus longtemps au lit. Plus vous évoluerez dans votre vie sexuelle, mieux vous apprendrez à connaître votre corps. Vous saurez donc plus facilement identifier votre point de non-retour et donc retarder le moment de l’éjaculation.
Tenir longtemps a toujours été un signe de virilité
↳ FAUX !
Aujourd’hui, être capable de faire l’amour longtemps est considéré comme un signe de virilité. Il n’est d’ailleurs pas rare de voir des hommes s’en vanter et des femmes avouer rechercher ce type de rapport. Pourtant, sachez que cela n’a pas toujours été le cas.
En effet, à différentes périodes de l’histoire, aux 4 coins du monde, éjaculer rapidement a été perçu comme un signe de bonne santé et associé à une forte capacité de reproduction.
Des concours ont même existé pour mettre à l’honneur celui qui était capable d’éjaculer le plus vite ! De quoi dédramatiser un peu, non ?
Dernière mise à jour le 23/09/2021.